mardi 7 février 2017

Reminiscence

Lentement, je me noie dans un torrent de simples figures de style et je m'échappe en silence au comptoir des dissonances. Je mène de front ma vie de pacotilles balancée entre les fastidieuses soirées à travailler pour un salaire de misère et mes inlassables tortures mentales qui menacent mon équilibre fragile. S'abreuver de mots pour tromper les maux est ma dernière chance de survivre dans ce bas monde et je m'accroche à ces infimes particules de bonheur pour continuer de briller dans la nuit noire.

Ma tête, plongée dans cet océan de noircissure, se lasse de ces enchantements funestes et crépite comme par magie sur le versant opaque de sa troublante mansuétude. La lutte rend la bataille difficile, souvent la brasse se heurte à la tempête et je bois l'eau de mer quand ses vagues me surplombent violemment et viennent heurter le coin de ma tête. Je lutte heure après heure et je fixe patiemment l'horizon en espérant rejoindre la terre ferme. A mesure de mon avancée, ce qui ressemblait à une échappatoire de plus en plus palpable a fini par se mouvoir en un simple point fixe qui reculait et finissait par disparaître comme une trainée de poudre sur la ligne invisible de l'infini. Ma quête était désormais vaine. J'avançais à l'aveugle, tantôt je reculais pour mieux me perdre dans ces torrents de mercure qui se nourrissait de mon altération mentale et des effets physiques qui découlaient de sa présence dans mon sillage. La souffrance était partout. Mon corps ressentait les effets de la pesante énergie que me demandait ses déplacements sur la surface de l'eau. Ma tête, quant à elle, finissait par ne plus se tenir suffisamment droite et je la sentais se tordre douloureusement sous l'accrétion de mouvements répétitifs dans un environnement aussi dérangeant qu'il était contre-nature. Toutes mes tentatives s'étaient d'elles-mêmes vouées à l'échec et je balançais d'un torrent à un autre, d'une vague à l'autre sans pouvoir me poser et reprendre mon souffle. L'étrangeté du moment me ramenait à cette vie douteuse que j'avais souvent mené sans me défendre. Certes, j'étais devenue plus combattive avec les années et je me rebellais contre ma propre mélancolie mais mon obscurité était grandissante, perverse et sournoise ce qui me plongeait souvent dans une solitude confortable pour éviter de la réveiller. Mon seul répit était de me balancer violemment entre ces deux murs de grès pour me lacérer la peau afin de m'appesantir de ma détestable condition humaine. J'ai souvent pensé à me tuer, à décharner cette enveloppe oppressante mais une force aussi ancienne que moderne me forçais à gratter le sol et à mordre la poussière sans que je ne sache précisément où cet acharnement me conduirait avec le temps. Je ne connaissais définitivement pas le but ultime de cette mascarade car depuis longtemps, je ne croyais plus aux affres du bonheur mais si la finalité était la déchéance la plus abrupte alors je me consolerai en imaginant que les épreuves auront tout au moins forgé ma ténacité face à l'adversité.

Et s'il me reste encore cette volonté farouche à enfoncer mes doigts dans cette fontanelle invisible qui éconduit ma vision sordide de la vie alors je resterai debout et j'écraserai toutes les follicules qui étreignent maladivement mes synapses. Et je me battrai, jusqu'à ce qu'il ne reste qu'un champs de ruine dans la bataille, contre cette guerre qui m'oppose depuis des siècles, à cette nécrose latente qui torture mon cerveau. La girouette au dessus du panier s'est vu sauvagement malmené par un de ces marionnettiste raté qui me donne encore aujourd'hui envie de l'écraser de tout mon poids. Malheureusement, il pourra au moins se targuer qu'aucune larme n'ait pu un jour nettoyer la putrescence de sa fédératrice emprise et qu'il aura au moins réussi à façonner l'étrange visionnaire que je suis advenue aux sombres échos de son absolue folie.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire